Elle goûte la sauce, grimace, se lève brusquement.

— C’est trop épicé ! Tu veux me faire perdre le bébé ?

La gifle est invisible, mais violente. Ma belle-mère se redresse lentement, plante ses yeux dans les miens.

— Depuis qu’elle est enceinte, tu fais tout pour l’empoisonner.

Je suis figée. Je ne comprends pas. Je n’ai rien fait. J’ai suivi les instructions. J’ai goûté moi-même.

— Ce n’est pas vrai… Je n’ai rien changé à la recette.

— Silence ! Tu crois que je ne vois pas ta jalousie ? Tu es stérile et tu veux qu’elle le soit aussi ?

Le mot tombe. Cruel. Tranchant. Stérile. Comme un couperet qui s’abat encore et encore. Je baisse les yeux. Les larmes me montent, mais je refuse qu’elles coulent. Malick entre, assiste à la scène, impassible.

— Elle a fait de son mieux, dit-il enfin, sans conviction.

Puis il prend ses clés.

— Je vais acheter autre chose à manger.

Il revient une demi-heure plus tard avec une pizza pour Absa, qu’il dépose dans sa chambre. Il ne me regarde pas. Ne dit rien. Juste un soupir, avant de regagner notre lit.

— Je n’ai pas voulu… Je pensais que le piment était doux, murmuré-je dans l’obscurité.

Il ne répond pas. Son téléphone vibre. Un message. Il se lève, consulte l’écran, puis annonce :

— Absa a des douleurs. Je vais voir.

La porte se referme sur son dos. Et moi, je reste là. Vide. Épuisée. Abandonnée dans ce corps sans fruit. On m’avait promis que l’amour suffisait. Mais dans cette maison, ce n’est pas l’amour qui sauve. C’est la maternité